Apêrçu de l'histoire de Schluchsee

La commune de Schluchsee se situe dans le sud de la Foret Noire. Elle comprend plusieurs villages et hameaux tout autour du lac de « Schluch » (Schluch venant d « Schlauch » = tuyau, allusion à sa forme), l’altitude variant entre 700 et 300 m.

A l’origine, un lac naturel qui ne mesurait que 3 km de long et 300 à 900 m de largeur, au fond d’une vallée assez loin de la commune principale d’aujourd’hui. C’est l’édification d’un barrage, entre 1929 et 1933, qui en a fait le plan d’eau le plus étendu de la Forêt Noire : 7,5km de long, 30m plus haut, ce qui a profondément modifié le paysage.

Jusqu’au Moyen Âge, la Forêt Noire était inhospitalière, assez inaccessible, au climat rude. Les premiers habitants du pays furent des ermites. Peu à peu, un couvent s’établit à St.Blasien (Saint-Blaise). Notez la proximité de St. Gall, un des couvents fondateurs du christianisme dans la région (8ème au 10ème siècle). Le premier document écrit est de 1125 et mentionne la donation d’une ferme de Schluchsee au couvent de St. Blasien.

Ce couvent eut des siècles durant la mainmise sur toute la région, tout en se mettant sous la protection de différents seigneurs de 1370 à 1806, ce fut la maison des Habsbourg, doc les rois et empereurs d’Autriche. Comme dans la future Suisse, des baillis plus ou moins puissants étaient chargés d’exercer la justice et de lever les impôts. Du 11ème au 13ème siècle, on commença à défricher et à cultiver les terres de la région, qui furent données en fief aux paysans (la terre appartenant aux couvent). La première église fut construite, dont la tour (de1272 existe toujours. Mais pendant 4 siècles encore, les moines venaient du couvent pour dire la messe (à pied ou à dos d’âne, et sans la route actuelle…). La vie des habitants était dure. Les princes ou nobles locaux (baillis) et le couvent exerçaient un dur régime d’impôts sans toujours s’occuper de la détresse des paysans. Aussi, quand le message du réformateur Martin Luther, avec la notion de la « liberté de tout chrétien », parvint au pays, ce fut une étincelle qui embrasa la région. Le couvent réagissant sans pitié envers les convertis, une horde de paysans attaqua le 1er mai 1556 le couvent de St. Blasien (comme ailleurs dans la Forêt Noire), pillant et dévastant pendant 6 jours, jusqu’à ce que les soldats autrichiens arrivent. Les meneurs furent exécutés. Mais le 11 avril 1526, une charge de poudre fit exploser le couvent, et le chroniqueur nous dit que depuis, l’esprit de révolte resta vivant dans le pays.

Cependant, tout rentra dans l’ordre. Le pays prit un nouvel essor avec l’établissement de verreries, d’abord au sud du lac (Blasiwald). Un contrat avec le couvent est daté de 1597. Ces verreries n’avaient non seulement besoin du sable approprié, mais surtout de bois pour la fabrication du verre. Après un certain nombre d’années, la forêt à l’alentour était entièrement déboisée, et les verriers déménageaient un peu plus loin. Par bonheur, on avait tout prévu au couvent : il étit entendu que les maisons devaient rester en l’état, et que les terres ainsi défrichées seraient occupées par des fermiers pour les cultiver. Ainsi, le nombre d’habitants et de hameaux augmenta peu à peu. Il y eut plus tard une dizaine de maîtres verriers à Äule (au nord-ouest du lac), et cela ne fut pas toujours bien vu ; les droits de propriété de la forêt étaient pendant très longtemps sujet de procès et de disputes jusqu’au 19ème siècle.

Mais, pour en revenir au lac : il semble, d’après un document de 1562, qu’à l’époque déjà, il y avait un établissement de bains où l’on pouvait boire du vin de « zone franche », càd. pour lequel on n’avait pas payé d’impôts. Ce qui revient à dire que Schluchsee est de loin le plus ancien établissement de cure dans un vaste rayon alentour !!!

Cependant, au début du 17ème siècle, il y eut de mauvaises récoltes, de la famine, et en 1618, ce fut le début de la guerre de 30 ans (peu de Français savent que ce siècle, le « grand siècle » pour la France fut une catastrophe en Allemagne dont la population fut décimée autant par les épidémies de peste que par la guerre). Même si cette guerre ne toucha la région que tard, celle-ci eut un lourd tribut à payer (1634-1638).

Le siècle suivant apporta du nouveau pour Schluchsee : enfin, la commune reçut sa propre cure, après un agrandissement de l’église (1662, 1701). Mais il fallut payer et assurer la marche de cette cure, alors que la population restait très pauvre. Ensuite, il y eut un véritable procès autour de la propriété de la forêt entre le baillage de Schluchsee et le couvent de St. Blasien, il dura 45 ans et continua encore après contre le grand-duché de Bade.  Ce fut l’occasion pour les habitants de s’affirmer et de se solidariser à l’époque de la révolution française. Les « Franzosenkriege » (guerres napoléoniennes) eurent comme premier résultat concret la dissolution du couvent de St. Blasien, coupure importante. Dorénavant, Schluchsee était sous l’autorité du grand-duc de Bade. La détresse de la première décennie de ces guerres était épouvantable. On augmenta les impôts jusqu’à 100 fois plus (1815), sans compter le recrutement de soldats, le passage de troupes, les pillages, le brigandage. La commune de Schluchsee (plus petite qu’aujourd’hui) comptait alors 476 habitants.

 

Entre 1815 et 1848, ce fut une période de tensions sociales et politiques. Les princes allemands n’accordaient pas les constitutions promises ni les améliorations matérielles. Ce fut alors la révolution de 1848/49. Un curé de Schluchsee, Johann Georg Zeller, de même que le patron du « Sternen » de l’époque, furent des révolutionnaires acharnés, et ils furent condamnés par la suite. Une troupe de plusieurs centaines de personnes marcha à travers le pays. Partout, on s’armait en secret. Le gouvernement de Karlsruhe fut destitué, le grand-duc s’enfuit en Alsace, on planta un arbre de la liberté à Schluchsee. Mais les troupes prussiennes arrivèrent pour rétablir l’ordre. Des dizaines de milliers de personnes émigrèrent, et le  Bade fut longtemps occupé. Le peuple, découragé, perdit toute initiative.

Puis, ce fut le début des temps modernes : un tourisme encore timide, la construction de routes, un certain bien-être. La première guerre mondiale interrompît à nouveau le développement, et ce n’est qu’en 1926 que fut inauguré le chemin de fer entre Titisee et Schluchsee, dont les plans dataient de 1908. Désormais, l’essor de la commune se poursuit : on projeta le barrage. Comme pour toute chose nouvelle, les résistances furent vives et longues : La centrale électrique fut fondée en 1921, mais la construction du barrage ne put se faire que de 1929 à 1932. Il fallait convaincre et indemniser les propriétaires de 50 ha de terres, de forêts, de chasses, de pêches. Le paysage changea. Plus de 2000 ouvriers avaient construit le barrage, beaucoup restèrent. Sans la deuxième guerre mondiale, le développement de Schluchsee aurait été très rapide alors.

Le 27 avril 1949, les troupes françaises occupèrent Schluchsee (il n’y eut pas de résistance). Tous les hôtels et pensions furent réquisitionnés. Jusqu’à la réforme monétaire (1948), le rationnement fut maintenu. On comptait alors à Schluchsee 906 Allemands et 360 Français. 62 hommes de la commune étaient morts ou disparus à la guerre. 140 réfugiés allemands venant de l’Est (Prusse orientale, Silésie…) furent accueillis (un grand nombre de protestants). Il fallait construire des logements, et le nombre de habitants s’accrut rapidement/ Le tourisme augmenta, on organisa la « Kurverwaltung » (office de tourisme et de cure), il y eut 84000 nuitées d’hôtel en 1952, 276000 en 1968. Schluchsee (avec son maire Hermann Schlachter) fit des efforts énormes d’embellissement, de rénovation : construction d’une piscine (1969-71), du parc, de la Schluchseehalle.

En 1974 enfin, Schluchsee fut consacré « station de cure climatique » pour des maladies de voies respiratoires, des troubles fonctionnels cardiaques et de circulation, des états de fatigue physique ou psychique.

Une belle église toute neuve fut construite en 1979, mais on garda l’ancienne tour. Presque tous les bâtiments du centre furent transformés.

 

 

(d’après « Schluchsee, Kurzchronik » der Bernhard Steinert, 1983)